Allemagne : les actes antisémites ont augmenté l’an dernier

Le pays, pourtant marqué par sa responsabilité dans la Shoah, n’échappe pas à la montée de l’antisémitisme qui touche nombre de pays européens dont la France.

 Après une agression à Berlin qui avait choqué le pays, la communauté juive de la capitale a appelé à un rassemblement de solidarité en avril, invitant juifs et non juifs à se coiffer de la kippa.
Après une agression à Berlin qui avait choqué le pays, la communauté juive de la capitale a appelé à un rassemblement de solidarité en avril, invitant juifs et non juifs à se coiffer de la kippa. AFP/Tobias SCHWARZ.

    Alors l'extrême droite est en plein essor outre-Rhin, l'augmentation des actes antisémites recensés l'an passé atteint un seuil que l'Allemagne n'avait plus connu depuis dix ans. De quoi inquiéter le gouvernement de Merkel. Cette montée de l'antisémitisme intervient alors que d'autres pays européens sont confrontés à un phénomène similaire, en particulier la France où la communauté juive a appelé mardi à « un sursaut national » alors que les actes antisémitiques ont bondi de 74 % l'an dernier.

    En Allemagne, pays dont l'identité nationale est marquée par sa responsabilité dans la Shoah, 1 646 actes antisémites ont été recensés en 2018. Soit une hausse de près de 10 % par rapport à 2017, selon les données préliminaires de la police allemande transmises à la demande du groupe parlementaire de la gauche radicale Die Linke et publiée mercredi par le Tagesspiegel.

    Quarante-trois blessés l'an dernier

    Les violences antisémites sont-elles passées de 37 à 62, faisant 43 blessés l'an dernier, selon ces données préliminaires, les statistiques définitives étant publiées en mai. Il faut remonter à 2007 pour retrouver un nombre équivalent de violences antijuifs (64).

    Le président du Conseil central des juifs d'Allemagne, Josef Schuster a dénoncé mercredi « une tendance effrayante » et appelé à « un engagement plus fort et urgent contre l'antisémitisme des politiques, de la police et de la justice ».

    Et « si l'on pense à tous les actes qui ne relèvent pas du pénal, les choses sont encore plus inquiétantes », a ajouté le responsable de cette communauté qui compte environ 200 000 personnes en Allemagne.

    Une agression à Berlin marque les esprits

    Le gouvernement allemand a relevé en 2018 être confronté à deux formes d'antisémitisme, celui lié à l'extrême droite, mais aussi celui attribué à l'afflux de centaines de milliers de migrants du monde arabo-musulman en 2015-2016.

    Plusieurs affaires ont choqué le pays l'an passé, en particulier l'agression en avril à Berlin d'un Arabe israélien portant une kippa. Des manifestations de solidarité invitant juifs et non juifs à se coiffer de cette calotte portée traditionnellement par les Juifs avaient été organisées. L'agresseur était un jeune Syrien de 19 ans récemment arrivé et qui a été condamné à un mois de prison ferme. L'agression, filmée, a eu un énorme retentissement.

    Le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), qui a fait une entrée historique au parlement fin 2017, a lui été au centre de nombreuses polémiques liées au nazisme.

    Un « Monsieur antisémitisme » nommé par Merkel

    Dans ce contexte, Angela Merkel, a décidé en 2018 de nommer pour la première fois un délégué gouvernemental pour la lutte contre l'antisémitisme.

    La chancelière s'est aussi inquiétée à de nombreuses reprises, notamment en novembre lors de la commémoration du pogrom nazi de la Nuit de Cristal, de l'essor des actes antijuifs en Allemagne et ailleurs en Europe, sur fond d'envolée électorale des partis populistes et d'extrême droite.

    Une étude d'opinion de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne réalisée de mai à juin 2018 auprès des communautés juives montre que le sentiment d'antisémitisme est le plus prononcé en France puis en Allemagne, en Belgique et en Pologne.