Anesthésiste de Besançon : un enfant de 4 ans possible victime

Teddy, 4 ans, avait subi deux arrêts cardiaques lors d’une opération en février 2016. Il avait été réanimé par le docteur Frédéric Péchier.

 L’anesthésiste Frédéric Péchier au Palais de Justice de Besançon, en septembre 2017.
L’anesthésiste Frédéric Péchier au Palais de Justice de Besançon, en septembre 2017. LP/Olivier Lejeune

    Teddy, quatre ans, devait simplement se faire opérer des amygdales… mais il avait bien failli y perdre la vie. Le cas de ce garçonnet, opéré il y a trois ans à la clinique Saint-Vincent de Besançon (Doubs), fait aujourd'hui partie de la quarantaine de cas d'empoisonnements potentiels, dont quinze mortels, sur lesquels le docteur Frédéric Péchier est interrogé depuis mardi. Sa garde à vue doit s'achever ce jeudi matin. Selon nos informations, ce dernier niait toujours mercredi soir toute implication dans les faits pour lesquels il était entendu.

    L'anesthésiste de 47 ans avait déjà été mis en examen, en mars 2017, pour avoir volontairement pollué les poches de perfusion de sept patients âgés de 37 à 53 ans avec des anesthésiques locaux ou du potassium. Tous avaient fait des arrêts cardiaques, mais deux d'entre eux n'avaient pas survécu.

    « Les parents de Teddy attendent avec impatience de savoir s'il y aura une mise en examen, détaille leur avocat Me Jean-Michel Vernier. Ils ont vu leur enfant entrer pour une opération de quelques minutes, être transféré en urgence au CHU après deux infarctus. Imaginez le choc pour eux… »

    Un modus operandi qui rappelle les autres dossiers

    Le 22 février 2016, le garçonnet avait fait un premier arrêt cardiaque au bloc. Comme souvent en cas de problème, le docteur Péchier avait alors été appelé en renfort par sa collègue et avait posé très vite un diagnostic. C'est lui qui va ranimer une fois, puis une seconde fois, le petit garçon, avant son transfert à l'hôpital de Besançon. Un modus operandi qui rappelle les sept dossiers déjà connus.

    Les parents, qui avaient porté plainte contre X en 2017, ont donc déposé une nouvelle plainte, cette fois contre le docteur Péchier, faisant le lien avec les soupçons qui pèsent sur l'anesthésiste-réanimateur. Une expertise avait également été réalisée à la demande des parents, dans le cadre d'une procédure civile.

    « Elle a écarté plusieurs hypothèses, comme celle de la malformation cardiaque ou la possibilité qu'il ait été mal intubé, détaille Me Vernier. Malheureusement, certains dosages sanguins n'ont pas été réalisés au moment des faits. Or ils auraient pu permettre de savoir si on était face à un choc anaphylactique (NDLR : une réaction allergique sévère). Conclusion : on ne sait pas ce qu'il s'est passé. »

    Le «frisson de la réanimation»

    Cet « événement indésirable grave » (EIG), selon la terminologie officielle médicale, fait pourtant partie des cas que les enquêteurs ont choisi de retenir. Depuis deux ans, ils ont également passé au peigne fin la carrière du Dr Péchier, qui jouissait jusqu'à son arrestation d'une excellente réputation.

    C'est aussi la particularité de ce dossier déjà hors-norme : ces derniers suspectent le médecin d'avoir voulu se procurer le « frisson de la réanimation », en provoquant sciemment des situations dans lesquelles il pouvait briller devant ses collègues pour construire sa légende professionnelle.

    Le praticien devrait être déféré ce jeudi devant un juge d'instruction, avant une possible mise en examen pour de nouveaux cas d'empoisonnements. Jusqu'ici laissé libre sous contrôle judiciaire avec interdiction d'exercer, il pourrait cette fois être placé en détention provisoire.

    L'avocat de Frédéric Péchier, Me Randall Schwerdorffer, assurait mardi que l'on était « très en dessous d'une cinquantaine de cas » suspects. Le médecin « collabore » et maintient « qu' il n'a jamais été impliqué de près ou de loin dans un empoisonnement », précisait le pénaliste.