Destitution de Macron : bureau de l’Assemblée, Haute Cour, vote… Quelles sont les différentes étapes de la procédure ?

Pour arriver à la destitution du président de la République Emmanuel Macron, la loi française prévoit un long processus. Et sans majorité absolue à l’Assemblée nationale comme au Sénat, il semble difficile d’imaginer que la proposition d’une partie de la gauche aboutisse.

La première étape de la procédure de destitution se passe au Bureau de l'Assemblée nationale. AFP/Ludovic Marin
La première étape de la procédure de destitution se passe au Bureau de l'Assemblée nationale. AFP/Ludovic Marin

    Après des semaines de débats et de commentaires, la proposition de destitution d’Emmanuel Macron va enfin être étudiée mardi à l’Assemblée nationale. Le premier palier d’une longue procédure qui a peu de chances d’aboutir.

    La France Insoumise a lancé ce processus après le refus d’Emmanuel Macron de nommer une candidate du Nouveau front populaire (NFP) à Matignon, alors que la coalition de gauche est arrivée en tête aux élections législatives anticipées. La proposition de résolution a été déposée le 4 septembre, jour de la nomination de Michel Barnier (Les Républicains) comme Premier ministre.

    Le lancement de cette procédure se veut une « réponse politique à la hauteur du coup de force antidémocratique qu’est en train de faire le président » de la République, avait expliqué début septembre la cheffe des députés insoumis, Mathilde Panot.

    Première étape : le Bureau et la commission des lois

    La procédure de destitution est encadrée par la loi n° 2014-1392 du 24 novembre 2014. Elle indique que la première étape doit se faire devant le Bureau de l’Assemblée nationale. Cet organe est composé de 22 membres : la présidente du Palais-Bourbon, les vice-présidents, questeurs et secrétaires.

    Ce Bureau vérifie la recevabilité du texte, selon plusieurs critères exposés dans l’article 68 de la Constitution. Ce dernier explique que « le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. » Le manquement « peut être caractérisé par un comportement politique ou privé », précise le site Vie Publique.



    Sur les 22 membres du Bureau, le NFP détient 12 postes, ce qui devrait permettre de faire passer la proposition à l’étape suivante. Mais au sein de la coalition de gauche, la question de la destitution divise. Le Parti socialiste a toutefois déclaré lundi soir que ses trois représentants au Bureau valideraient la proposition : « nous ne nous opposerons pas à sa recevabilité », écrivent les députés socialistes dans un communiqué. Ils ajoutent cependant qu’ils ne soutiendront pas la motion aux paliers suivants : « nous nous opposerons unanimement à cette proposition lors de son examen en séance publique », écrivent-ils.

    En cas d’adoption au Bureau, la proposition de résolution est en effet « envoyée pour examen à la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles, qui conclut à son adoption ou à son rejet », dit la loi. Or, le NFP n’a pas la majorité à la commission des lois. Si elle passe tout de même, elle devra être inscrite au plus tard treize jours après à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, avec un vote au plus tard au quinzième jour.

    « La majorité des deux tiers des membres de la Haute Cour » nécessaire

    Le vote à l’Assemblée nationale ne se fait pas directement sur la procédure de destitution, il s’agit d’abord de voter pour que le parlement se constitue en Haute Cour, seule juridiction à pouvoir décider de la destitution d’un président de la République. C’est même son « unique mission », écrit Vie Publique. Cette proposition devra recueillir au moins « la majorité des deux tiers » des voix des députés. En cas d’échec, le chemin de la résolution s’arrête là.

    En cas d’adoption, « la proposition est alors transmise à l’autre assemblée (ici le Sénat, NDLR) qui doit se prononcer dans les quinze jours. Si elle ne l’adopte pas, la procédure est alors terminée », explique encore le site institutionnel.

    Mais si elle est acceptée, la Haute Cour nouvellement constituée, « présidée par le président de l’Assemblée nationale, doit se prononcer dans un délai d’un mois » sur la destitution. Pour qu’elle passe, « la majorité des deux tiers des membres de la Haute Cour » est nécessaire.



    Avec 193 députés, le NFP ne réunit qu’un tiers des élus à l’Assemblée nationale, et certains ont d’ores et déjà déclaré qu’ils ne voteraient pas pour la destitution, comme l’ex-président socialiste François Hollande. Le nouveau député a indiqué au journal Sud Ouest qu’il ne s’associerait « d’aucune façon » à une procédure qui « vise à remettre en cause nos institutions », recommandant de « ne pas (y) donner suite ».

    Le groupe des députés PS a expliqué que les élus voteraient contre son adoption à l’Assemblée car la procédure est « vouée à l’échec » et risque de donner une forme de « légitimité » au chef de l’État. « Nous ne voulons donner aucune victoire à Emmanuel Macron », écrivent-ils.

    Et le Rassemblement national (142 députés), a fortement critiqué cette proposition : « Tout cela c’est du cinéma, ça n’aboutira pas », avait balayé le député RN Sébastien Chenu.