16 juillet 2018 : les Bleus gagnent « une deuxième étoile pour la vie » dans un instant de liesse absolue

80 ANS DU PARISIEN. Il y a six ans, les Bleus triomphaient face à la Croatie (4-2). Ils étaient sacrés champions du monde de football pour la deuxième fois de leur histoire et faisaient basculer le pays dans une douce folie.

«La tête dans les étoiles», titre Le Parisien, le 16 juillet 2018, après la victoire en Coupe du monde des Bleus. Le Parisien-DA
«La tête dans les étoiles», titre Le Parisien, le 16 juillet 2018, après la victoire en Coupe du monde des Bleus. Le Parisien-DA

    Notre rendez-vous anniversaire « 80 ans du Parisien, 80 unes »

    Le tout premier numéro du « Parisien » paraît le 22 août 1944, en pleine libération de Paris. Pour célébrer cet anniversaire, nous vous avons sélectionné 80 unes historiques ou emblématiques de leur époque. Sport, faits divers, conquête spatiale, élections présidentielles, disparitions de stars… Elles racontent huit décennies d’actualité. Nous avons choisi de vous en raconter les coulisses. Une série à découvrir jusqu’à la fin de l’année.

    Le même goût d’infini et de plénitude. Vingt ans après le sacre de 1998, Kylian Mbappé et sa bande remportent la Coupe du monde face à la Croatie (4-2) et font à leur tour basculer la France dans une liesse et une euphorie au parfum unique. Celui des épopées glorieuses et des bonheurs collectifs. Quand on l’a tant attendue, la deuxième gorgée a des allures de première fois. De celle qui rend ivre de joie de Moscou à Nouméa en passant par les Champs-Élysées ou le petit bistrot de Saint-Dyé-sur-Loire (Loir-et-Cher), où la foule assurait dans nos colonnes vivre « un moment historique ».

    « La tête dans les étoiles », résume la une de notre journal sur laquelle on voit le capitaine Hugo Lloris, le visage rageur, brandir la coupe que Kylian Mbappé dévore des yeux. Le gamin de 19 ans, auteur du quatrième but tricolore, rayonne sous la pluie qui s’abat sur la capitale russe depuis la fin du match. Un orage titanesque qui a failli gâcher la photo de la fête. Sur le terrain, la plupart des appareils des reporters sont noyés sous les trombes d’eau. Arnaud Journois, l’envoyé spécial du Parisien arrive à se débrouiller pour réaliser LE cliché qui s’affiche quelques minutes plus tard en une du site et, le lendemain, dans les kiosques où la version collector du journal s’arrache.

    De la pluie et des larmes de bonheur

    Tout à leur joie et loin de ces contraintes matérielles, les Bleus s’amusent comme des gamins sur la pelouse du stade Loujniki transformée en immense patinoire sur laquelle Presnel Kimpembe, Thomas Lemar ou Antoine Griezmann se jettent sur le ventre, les genoux ou le dos pour de longues glissades au milieu d’immenses gerbes d’eau. Les confettis dorés collent à leurs visages presque aussi fermement que leurs inamovibles sourires. « Nous irons tous au paradis et les Bleus nous en ouvrent les portes ici et maintenant », écrit Dominique Sévérac, notre journaliste, à ce moment extatique, entre rêve et réalité.

    Depuis les tribunes du stade de Moscou, on devine la joie qui dégringole sur le pays aussi fortement que les ruisseaux mêlés de pluie, de larmes et de champagne qui coulent sur les nouveaux champions du monde. Didier Deschamps, le capitaine de 1998 et le sélectionneur de 2018, est porté en triomphe. Les Bleus accueillent sur la pelouse leurs familles, les enfants se joignent à la fête, les embrassades se multiplient. Larmes aux bords des yeux, la mère de Paul Pogba, est aux anges : « Je suis une maman tellement fière. De mon fils, bien sûr, mais de tous ces garçons, confie Yeo Moriba à l’un de nos reporters. Ils forment une équipe formidable, solidaire, surtout quand c’est difficile comme aujourd’hui. Maintenant, on va fêter ça comme il faut. »



    Les célébrations avaient commencé d’une drôle de façon sur le podium protocolaire totalement inondé. Le contraste entre des Bleus hilares enlacés par le président Emmanuel Macron à la chemise blanche devenue transparente sous l’orage et le visage fermé et impassible de Vladimir Poutine donne une drôle de tournure à la cérémonie officielle. La scène devient ensuite quasi lunaire dans le vestiaire quand les deux chefs d’État se côtoient au milieu des bouteilles de bière et de champagne, tandis que le trophée est posé sur la table « à côté des caleçons soigneusement pliés », comme le souligne un des journalistes du Parisien.

    « C’est la génération Liberté, Égalité, Fraternité »

    Les Bleus font irruption au beau milieu de la conférence de presse de Didier Deschamps pour l’arroser et danser sur la table sous le regard de journalistes médusés puis hilares. Coiffé d’un improbable sombrero tout au long de la soirée, Lucas Hernandez est déchaîné. « On nage dans le bonheur », glisse le sélectionneur tricolore. Antoine Griezmann, lui, « n’a qu’une hâte, de rentrer et de fêter cela avec les Français ».

    Ces derniers n’ont pas attendu le retour triomphal des Bleus, le lendemain, pour une descente mémorable des Champs-Élysées. Le soir même, l’avenue parisienne est noire de monde à l’image de toutes les places de villages du pays. « C’est la génération Liberté, Égalité, Fraternité », rigolent Yaya et Diafana à peine débarqués de Montluçon (Allier). À quelques centaines de mètres, ils étaient près de 100 000 entassés devant les écrans géants installés sur le Champ-de-Mars.

    Une foule immense qui bascule dans la folie au coup de sifflet final. « Je peux mourir tranquille », clame Julio du haut de ses 26 ans en paraphrasant les mots de Thierry Roland en 1998 ! Une joie similaire qui donne à Denis, 70 ans, l’impression « de rajeunir de vingt ans » ! Le foot a des vertus inattendues.

    Les chanceux qui avaient réservé leur billet au Stade de France pour voir Beyoncé et Jay-Z ont eu droit au match en première partie. Comme un pèlerinage sur les traces dorées de Zizou, ils sont des dizaines de milliers à hurler de joie devant l’exploit de ses héritiers avant de danser sur les tubes du duo de stars débarquant sur scènes vêtues du maillot au désormais deux étoiles !

    La naissance de l’étoile Kylian Mbappé

    Des sourires s’affichent sur chacune de la trentaine de pages que consacre le journal à l’événement. Sacré en 1998, Frank Lebœuf clame sa « fierté d’être Français ». Tony, à Marseille (Bouches-du-Rhône), tient sa promesse et plonge tout habillé de son maillot bleu dans le Vieux-Port. Sur la plage du cap d’Agde, Franck le Breton savoure « un intense moment de joie ». Pascal Obispo reconnaît « avoir pleuré » devant l’exploit des Bleus quand Nikos Aliagas souligne « un moment hors du temps ».



    Du côté de Pantin (Seine-Saint-Denis), Gloria se réjouit que le foot fédère le pays : « On est tous différents, mais aujourd’hui, il n’y a qu’un seul pays », sourit la sexagénaire. Mais la soirée la plus douce est certainement vécue à Arnouville (Val-d’Oise). Vingt ans après un premier baiser échangé lors de la finale au Stade de France où ils étaient volontaires, Sandra et Patrick vivent une deuxième finale en compagnie de leurs trois enfants. « Je retombe amoureuse pour vingt ans », fond Sandra, qui résume l’ambiance de la soirée de Moscou au Val-d’Oise : « On est heureux. »

    Pour grappiller encore un peu de bonheur, Le Parisien n’en reste pas là avec ses champions. Le 17 juillet, le retour des héros s’affiche plein pot en une. Cette célébration sera suivie des confidences exclusives de Didier Deschamps qui nous assure qu’il y a « encore de belles choses à faire ».

    La séance se clôt avec le visage de Kylian Mbappé. Une photo de lui, à l’âge de 12 ans, fixant l’objectif tout en embrassant un petit ballon de foot, est barrée d’un titre prophétique : « Une étoile est née. » Sa troisième une du Parisien en quelques jours déjà. Le dimanche 1er juillet, nous titrions « Magnifique ! » après son doublé lors de France - Argentine (4-3).

    La première d’une très, très longue série avec les Bleus.