Euro 2024 : « Je ne souhaite aucune récupération politique », met en garde Philippe Diallo

Ce mardi, le président de la Fédération française était en conférence de presse à Paderborn, le lieu d’entraînement des Bleus. Il a été interrogé sur la crise politique que traverse la France et sur laquelle Marcus Thuram et Kylian Mbappé se sont prononcés.

    L’actualité des Bleus, en marge de cet Euro et de leur victoire lundi soir contre l’Autriche (1-0), c’est aussi l’arrivée en tête du Rassemblement national aux élections européennes en France et sa possible ascension au pouvoir après la dissolution actée par le Président de la République. Dans ce contexte brûlant, deux joueurs plus que d’autres, ont tenu à livrer une parole forte, Marcus Thuram et Kylian Mbappé, le premier appelant même à barrer la route du parti d’extrême droite. Philippe Diallo, le président de la Fédération française de football, était en conférence de presse ce mardi, questionné sur le sujet.

    Est-ce qu’il existe une différence entre les joueurs et la Fédération sur la situation politique française ?

    PHILIPPE DIALLO. Il n’y a aucun souci. Depuis le départ, je suis clair. D’abord en dialoguant avec les joueurs. J’ai discuté et informé les joueurs au préalable de mes décisions, le capitaine et le vice-capitaine, c’est fait en pleine harmonie. J’ai toujours dit que je garantissais aux joueurs la liberté d’expression. Ce sont des jeunes hommes qui ont un regard sur la société. Il ne revient pas de les brider sur les sujets qui concernent la jeune génération. Moi-même, j’ai dit que c’est très bien d’appeler à aller voter, c’est un devoir civique. Certains sont allés plus loin. Je respecte cette position. Je suis président de Fédération, pas chef de parti. Je n’ai pas de consignes de vote à donner. Je dois veiller à un principe de neutralité. Notre Fédération rassemble les Français dans leur diversité d’opinion.

    Seriez-vous prêt à travailler avec un Ministre des sports d’extrême droite ?

    Je viens de le dire. Nous sommes respectueux de la tradition républicaine. Les élections démocratiques donnent les résultats qu’elles donnent. En tant qu’institution fédérale, nous respecterons le choix des Français.

    Êtes-vous fier des propos de votre capitaine, avant Autriche - France ?

    Ce n’est pas la première fois que les joueurs s’expriment Je ne suis pas là pour les inciter mais je respecte leur liberté d’expression. Nous avons des générations qui s’intéressent à tous les sujets, on doit s’en féliciter. L’ADN de l’équipe de France, c’est une équipe qui rassemble. Elle rassemble de manière très large. On a eu 12 000 Français au stade, beaucoup devant la télévision. Le lien avec les Français reste très fort. Il y a tellement de manières de se diviser qu’elle a le mérite de rassembler.

    Une initiative collective est en cours. Êtes-vous au courant, la soutenez-vous ?

    J’essaie d’établir un dialogue régulier avec les joueurs, pour une compréhension de part et d’autre. Je suis au courant de cette possible initiative. À ce stade, je n’en ai pas le contenu. Sous quelle forme, selon quel calendrier, je ne suis pas en mesure de répondre.

    Le devoir de neutralité que vous avancez concerne-t-il les Bleus en interne ou s’agit-il de l’extérieur ?

    Je considère que quand ils s’expriment, ils le font à titre individuel. J’ai vu des formations politiques tirer les déclarations vers elles. Je ne souhaite aucune récupération politique. Je ne souhaite pas que dans cette période, l’équipe de France soit instrumentalisée.

    N’avez-vous pas envie, compte tenu de la situation inédite, de donner votre opinion ?

    J’ai des opinions. Dans la fonction que j’occupe, il faut mettre de côté ses opinions pour défendre l’équipe de France et l’institution. Avec autant de licenciés, toutes les opinions sont représentées. Si par malheur, des lignes jaunes devaient être franchies, la Fédération et moi-même prendrions nos responsabilités.

    Les avez-vous mis en garde ?

    Ils ont l’habitude des médias. Ils ont une telle puissance médiatique, dans leur prise de position, ils doivent être vigilants à la récupération. C’est un élément que je leur ai rappelé. Ils ont rappelé des évidences, en rappelant ce que sont les valeurs de la République. Il n’y a pas entre ce que disent les joueurs et la Fédération. Dans mes fonctions, j’ai à défendre les valeurs de la République. Je suis en pleine communion de pensée et d’action avec eux.

    Finalement, vous vous inscrivez dans le sillage de Marcus Thuram et Kylian Mbappé…

    Je ne suis dans aucun sillage. Quand j’évoque le principe de neutralité, la Fédération a une mission de service public qui est de préserver les valeurs de la République. Les joueurs l’expriment à titre individuel et ma responsabilité est qu’ils puissent l’exprimer.

    Si certaines lignes étaient franchies, vous dites que vous prendriez vos responsabilités. Est-ce dire que vous démissionneriez ?

    Je ne fais pas de politique-fiction. Je suis celui qui est le garant des valeurs de la République au sein de la Fédération.

    Interdiriez-vous un appel collectif des joueurs à voter contre le RN ?

    Les prises de position ont été différentes, certains parlant des extrêmes. Il y a des clarifications à avoir sur les trajectoires à avoir. Je suis le garant de leur liberté d’expression. Je leur dis d’être toujours vigilants concernant le souci de l’unité, de mettre en œuvre les valeurs qui rassemblent les Français. Nous avons la chance de donner un havre de paix aux Français. Nous devons préserver cela. Je leur demande de prendre en compte l’unité et le rassemblement.