PSG-Nantes : Waldemar Kita, un président sans filtre

A la tête du club nantais depuis 2007, Waldemar Kita, président interventionniste et grand consommateur d’entraîneurs, ne laisse personne indifférent.

 Waldemar Kita sur la pelouse de la Beaujoire avant la rencontre de L1 entre le FC Nantes et Lille, le 31 mars 2019.
Waldemar Kita sur la pelouse de la Beaujoire avant la rencontre de L1 entre le FC Nantes et Lille, le 31 mars 2019. Icon Sport/Eddy Lemaistre/

    Qui est vraiment Waldemar Kita, 66 ans, émigré polonais, qui avec son seul diplôme d'optique s'est construit une fortune de plusieurs centaines de millions d'euros? Fier de cette réussite entrepreneuriale, l'homme de 65 ans vit une trajectoire beaucoup plus mouvementée avec le FC Nantes que le PSG affronte ce mercredi (21h05) et qu'il dirige depuis 2007. Courtois, respectueux, obsédé par son image - il s'entretient régulièrement, choisit ses vêtements avec soin, vérifie maladivement l'érosion du temps sur son visage -, il avance dans l'existence avec une foi en lui qui en sidère plus d'un. Un jour, il dira à Henri Michel, légende du FC Nantes, 57 sélections en équipe de France : « Si vous m'aviez connu plus tôt, vous auriez progressé plus vite. »

    L'un de ses amis témoigne : « Waldemar échappe à toutes les grilles de lecture habituelles. Il pense qu'il a vu la Vierge et qu'elle lui a parlé. Il entre dans un restaurant étoilé et court expliquer au chef comment faire des sauces. Il est habité par le sentiment d'être le meilleur. » Un autre le décrit comme « généreux et sympathique » et appuie : « Son problème, c'est qu'il n'a pas de filtre. Au bout de dix minutes, il va te dire que ta chemise est sympa, mais qu'elle ne va pas avec tes chaussures. » Franck Belhassen, agent de Valentin Rongier, complète : « Ce n'est pas un bluffeur ou un dissimulateur. Il dit immédiatement ce qu'il pense et ce qu'il souhaite. Son passé a formé sa personnalité, c'est quelqu'un qui s'est fait tout seul. »

    «Il est habitué à tout décider et a du mal à déléguer»

    Waldemar Kita nuance mais assume un style aussi tranchant que son regard bleu acier, notamment au FC Nantes : « Je mets beaucoup de millions sur la table, c'est normal que je dise ce que je pense. » En la matière, le dirigeant, dont le lancement dans l'agrandissement de pénis en 2016 a fait beaucoup parler le football français, ne lésine pas. Quatorze entraîneurs en treize ans (dont deux fois Der Zakarian)! Et toujours les mêmes soupçons d'interventionnisme. « Il est habitué à tout décider et a du mal à déléguer », confie un ancien salarié du FCN. « Je n'ai pas accepté son fonctionnement en matière de mercato, pour le reste il n'est jamais intervenu », tempère Vahid Halilhodzic. Un autre « ex » coupe court à l'évocation de son ancien boss : « Ça ne m'intéresse pas d'en parler, c'est un personnage qui n'en vaut pas la peine. »

    « C'est marrant, parce que tous les entraîneurs veulent travailler avec moi, rétorque Kita, qui déplore l'anonymat que requièrent certains détracteurs. Je laisse faire les gens dans une certaine mesure. Quand je vois que des choses ne vont pas, c'est normal que je les dise. » Le patron des Canaris, qui vit dans un immense appartement près de l'Arc de Triomphe, à Paris, suscite attraction et répulsion d'un même mouvement. Dans son métier, certains collaborateurs le suivent depuis trente ans. Ils aiment son sens de la fidélité, son caractère affable. Même ceux dont il s'est séparé finissent par renouer.

    « Il y a eu un peu de tension quand on s'est quittés, confie le journaliste de RTL et CNews Pascal Praud, à l'époque directeur général en charge de la communication et du marketing (2008-2010). J'ai travaillé deux ans avec lui et je n'en dirai pas de mal. Je le revois aujourd'hui et c'est un plaisir. Il y a à apprendre de tous les gens qui réussissent. » Lorsqu'il dresse le bilan, Kita retient plus facilement les joueurs éclos sous sa présidence (Dubois, Vainqueur, Rongier…) que les critiques quant à sa perte d'identité ou l'abandon de projet de stade, promptement décidé par les autorités locales après l'ouverture d'une enquête par le Parquet national financier au printemps dernier.

    Capable d'emportements verbaux cinglants

    « Vous parlez de l'enquête que la mairie m'a envoyée pour ne pas faire le stade ? s'étrangle-t-il. Tous les moyens sont bons. Ça ne me stoppe pas, parce que ce n'est pas honnête. Je gêne ! Vous pouvez me dire que je suis bon ou mauvais, que j'ai mauvais caractère, pas de problème. Mais une personne qui peut dire que j'ai été tordu, malhonnête, ou que je me suis mal conduit, je n'en vois pas beaucoup. Peut-être ma femme… »

    Capable d'emportements verbaux cinglants, il sait aussi s'amuser. Il l'a démontré en 2015, à l'occasion des 50 ans de Vadim Vasilyev qui rassemblait le gratin du football mondial à Monaco, en se lançant dans un concours de vodka épique avec Joan Laporta, ancien président du Barça. « Au bout d'un moment, Laporta était totalement déchiré, raconte un convive, hilare. Kita, lui, ne bougeait pas d'un cil. Il avait glissé un billet au serveur pour que sa bouteille soit remplie d'eau plutôt que d'alcool… »