Yvelines : aux assises pour avoir tué sa femme d’une balle dans la tête

Cet homme fiché S, soupçonné de liens avec la mouvance islamiste, a abattu sa femme, en juillet 2016 à Bonnières-sur-Seine.

 Bonnières-sur-Seine, ce mardi. C’est dans ce logement HLM que Leïla a été abattue par son mari.
Bonnières-sur-Seine, ce mardi. C’est dans ce logement HLM que Leïla a été abattue par son mari. LP/Mehdi Gherdane.

    C'est le crime d'un homme qui se pensait trompé et trahi. Adil Aazizi, 35 ans, doit répondre, jeudi matin devant la cour d'assises des Yvelines, à Versailles, de l'assassinat de son épouse Leïla, 29 ans, tuée d'une balle dans la tête, l'après-midi du 2 juin 2016 à leur domicile de Bonnières-sur-Seine.

    Il est presque 21 heures ce soir-là, lorsque Adil prévient les gendarmes. Le jeune homme confie aux militaires qu'il vient de tuer sa femme et qu'il est en route vers le domicile de ses parents à Courcelles-les-Lens (Pas-de-Calais). Il ajoute qu'il a déposé son fils, âgé de 4 ans, chez son oncle à Paris et qu'ils trouveront sa voiture Suzuki Swift garée porte Maillot, dans laquelle se trouve encore l'arme du crime : un pistolet Mauzer de calibre 7,65.

    Les gendarmes retrouvent le corps de la victime et un test de grossesse positif

    A 21 h 30, les gendarmes entrent dans ce logement HLM et découvrent sur le canapé le corps de Leila, tuée d'une balle dans la tempe. Les militaires mettent aussi la main sur un test de grossesse positif. Simultanément, le jeune homme est interpellé chez ses parents avant d'être placé en garde à vue dans les locaux de la brigade de Mantes-la-Jolie. Il passe immédiatement aux aveux et assure qu'il « a été trahi par sa femme », ce qui l'a « rendu fou ».

    Cet après-midi-là, Adil est en colère. Son fils et sa belle-mère lui ont parlé de l'amant de sa femme. Il a même parlé avec lui au téléphone. Les deux hommes ont discuté de la grossesse de Leïla. Adil sait que cet enfant n'est pas de lui et craint qu'un autre prenne sa place.

    Le mari trompé veut que Leïla avoue son infidélité. Il veut voir le contenu de son téléphone et exige qu'elle appelle cet homme et le fasse venir. Ils s'insultent. Il brandit son pistolet. Elle lance que l'arme est fausse. Il tire un premier coup de feu sur le côté pour prouver sa détermination. Adil repousse son épouse sur le canapé et selon sa version le coup serait parti sans qu'il ne s'en rende vraiment compte. « C'est une thèse qui ne tiendra pas longtemps devant la cour, avance Me Juliette Delmadent, l'avocate de la partie civile, car l'accusé est venu armé dans l'appartement et l'expertise technique de l'arme montre que la détente n'était pas ultrasensible ».

    Verdict mardi soir

    Il aurait acheté cette arme à des gens du voyage pour 650 € dans le but d'éliminer l'amant de sa femme. L'enquête montre aussi qu'il a passé du temps en Turquie et à la frontière Syrienne pour un soi-disant « voyage humanitaire ». Ce qui lui a valu d'être fiché S. « Il est aussi possible qu'il ait acheté cette arme dans cette zone de conflit », estime une source proche du dossier. Sa belle famille le décrit comme un homme violent avec Leila et qui se prévalait de principe religieux pour justifier ses actes. Mais Adil a toujours nié cette proximité avec l'Islam radical. Son avocat Me Emmanuel Riglaire, contacté cette semaine ne nous a pas répondu. Le verdict est attendu mardi soir.

    « LEÏLA ÉTAIT SÉPARÉE ET AVAIT DÉCIDÉ DE REFAIRE SA VIE »

    Pour l'avocate de la partie civile, Me Juliette Delmadent, Leïla n'a jamais trompé son mari car le couple était déjà séparé depuis longtemps. « Adil Aazizi vivait dans le Nord avec ses parents et Leïla avait pris la décision de refaire sa vie, explique l'avocate. Et je vais le prouver en montrant qu'il s'était désolidarisé du bail de l'appartement ». Durant l'enquête, l'accusé évoque plutôt une séparation avec son épouse qui aurait finalement décidé de ne pas divorcer. Devant le juge d'instruction, il confie qu'entre avril et juin, il n'a passé que deux nuits dans les Yvelines : « C'était des embrouilles tout le temps, on s'excusait juste après. Mais ce n'était pas comme avant. À chaque fois que je venais voir mon fils à Bonnières, j'étais viré de la maison. »

    Adil et Leila se sont rencontrés, en 2008 au Maroc à l'occasion des funérailles du père de celle-ci. Il a grandi dans le Nord de la France et elle à Mantes-la-Jolie. Ils se marient en 2010 : « Le plus beau jour de ma vie, c'était l'amour avec un grand A », raconte le mari meurtrier. Ils vivent dans le Nord, leur fils naît en 2011 et ils s'installent alors à Bonnières. Leïla trouve un emploi au conseil départemental à Mantes. Adil travaille comme technicien réparateur itinérant de machine à trier le courrier. Cet emploi le conduit dans toute la France. Les époux se retrouvent pour les week-ends et les vacances. Leila est une femme agréable et enjouée appréciée par ses collègues et ses amis. À partir d'octobre 2015, leur couple bat de l'aile. Elle veut se séparer et aurait finalement changé d'avis selon Adil. Elle raconte à sa famille que son mari est violent. Les disputes s'enchaînent et ils ne se voient plus.

    Au printemps 2015, Leila rencontre Benjamin au centre d'action sociale de Mantes où elle travaille. Celui-ci confie que la jeune femme l'a contacté sur Facebook avant qu'ils nouent une relation. Elle lui dira qu'elle est séparée. Les amants font même une escapade à Nice (Alpes-Maritimes) alors qu'Adil est en Turquie. Benjamin conduit le fils de la jeune femme à l'école et à ses activités. Il dort dans l'appartement et Leïla le présente souvent comme son compagnon. Et en même temps, tente de le cacher à sa famille qui finira par l'apprendre et réprouvera cette histoire.