Salon de l’agriculture : comment Loïc est parvenu à transmettre son exploitation d’arbres fruitiers

Producteur de pommes à Le Quiou, dans les Côtes-d’Armor, Loïc Hazard voulait céder son exploitation afin de partir à la retraite. Aidé par la chambre d’agriculture de Bretagne, il a trouvé un couple de jeunes repreneurs venus d’une autre région. Une transmission réussie.

Le Quiou (Côtes-d'Armor), le 7 février. Clément Rollant a repris l'exploitation de Loïc Hazard, qui a décidé de prendre sa retraite. LP/François Lepage
Le Quiou (Côtes-d'Armor), le 7 février. Clément Rollant a repris l'exploitation de Loïc Hazard, qui a décidé de prendre sa retraite. LP/François Lepage

    Notre dossier spécial Salon de l’agriculture

    « Je passe une fois par semaine acheter des pommes et boire le café. » Sous un ciel bleu hivernal, au milieu des rangs de pommiers, Loïc Hazard, 63 ans, se sent ici un peu comme chez lui. Et pour cause, il y a encore quelques mois, toutes ces terres et ces arbres aux branches nues lui appartenaient. Le Breton, autrefois associé avec son frère Martial, voulait prendre sa retraite, mais il n’avait pas d’enfant à qui transmettre son exploitation de 6 ha. Après avoir rencontré deux candidats à la reprise, il a finalement cédé sa ferme à Clément Rollant et Amélie Armand, un couple de trentenaires originaires d’Auvergne.

    Ces derniers se sont officiellement installés en agriculture biologique au Gaec (Groupement agricole d’exploitation en commun) les Fruits des bois à Le Quiou (Côtes-d’Armor) le 31 décembre 2021. « Amélie avait déjà une ferme en arboriculture en Auvergne mais je ne pouvais pas m’y installer avec elle. On a cherché à reprendre une exploitation dans notre région pendant deux ans mais sans succès », raconte Clément. C’est en élargissant ses recherches que le couple est tombé sur l’annonce de Loïc via le répertoire départ-installation géré par les chambres d’agriculture, une sorte de Boncoin pour les professionnels du secteur.

    Une installation pour 2,9 départs en Bretagne

    La Bretagne et sa douceur océanique ? Pourquoi pas ! Le couple a visité la ferme début avril puis est revenu au mois de juin. Après quelques semaines de réflexion, l’affaire était conclue. Une reprise assez rapide et réussie. « Les premières rencontres se sont bien passées. On avait la même philosophie, cette envie d’être proche de la nature et des gens », explique Loïc.

    À l’instar du Breton, nombreux sont les agriculteurs français confrontés à la question de la transmission. Avec le vieillissement important de cette catégorie de population, le sujet est même considéré comme sensible et stratégique. Le renouvellement des générations en agriculture est vital pour les territoires ruraux et l’autonomie alimentaire française. Selon le dernier recensement agricole, la moitié des fermes est dirigée par des exploitants âgés de 55 ans et plus, susceptibles de partir à la retraite dans la décennie. En Bretagne, on compte aujourd’hui une installation pour 2,9 départs. « Il y a des candidats mais pas forcément une adéquation entre l’offre et la demande », constate Valérie Lavorel, conseillère transmission à la chambre d’agriculture de Bretagne.

    « Beaucoup de gens veulent s’installer mais n’ont pas les compétences »

    Les exploitations les plus compliquées à transmettre sont celles qui comportent des bâtiments récents, des équipements à la pointe et qui demandent de gros capitaux dont ne disposent pas forcément les jeunes repreneurs malgré les aides financières. Il y a aussi le problème de la maison d’habitation qui peut parfois coûter plus cher que la ferme elle-même… « Il y a beaucoup de gens qui veulent s’installer, encore plus après le Covid, mais qui, même s’ils sont l’argent, n’ont pas les compétences », note Valérie.

    Au Quiou, même si Clément et Amélie avaient déjà de l’expérience, ils ont pu bénéficier de celle de Martial, le frère cadet de Loïc, qui est resté sur l’exploitation en tant qu’employé. « Cela faisait partie de l’accord et ça nous a permis d’avoir une transmission intéressante de compétences », explique Clément. Et Loïc d’ajouter : « Au début, ça faisait bizarre à Martial de travailler pour quelqu’un d’autre et de ne plus être son propre chef, mais ça va maintenant. » À tel point qu’il est question de prolonger son contrat qui était normalement prévu pour durer un an et demi.

    Anticiper et accompagner

    Afin de lever les freins à la transmission, la chambre d’agriculture de Bretagne mise sur l’anticipation et l’accompagnement. Elle met à disposition plusieurs outils comme le point accueil installation ou le réseau transmission agriculture chargés d’informer les repreneurs et cédants. Des visites gratuites de conseillers sont proposées tout comme des farm dating, des rencontres en tête à tête entre agriculteurs. Il existe aussi des stages de parrainage rémunérés pour un passage de relais sécurisé sur l’exploitation.

    Au Gaec les Fruits des bois, le trésor récolté il y a quelques mois, environ 90 tonnes de pommes à couteau, est conservé précieusement au frais. Comme au temps des frères Hazard, elles sont commercialisées en vente directe à la ferme ou auprès de boutiques bios, cantines scolaires et Ehpad. Sur l’exploitation, il n’y a pas eu de révolution. Le couple procède progressivement à quelques petits changements. Suivi de sa chienne Auzelle, Clément désigne une parcelle du doigt. « Ici, on a arraché des pommiers car la variété ne convenait pas. On va y planter des arbres à kiwi. » Le tour du propriétaire touche à sa fin. Il est temps pour Loïc de laisser Clément reprendre le travail et de rentrer chez lui, profiter de sa retraite bien méritée.