Commission européenne : qui sont les candidats à la succession de Juncker ?

En 2014, Jean-Claude Juncker avait été choisi par les dirigeants des Etats membres parce qu’il était la tête de liste du PPE, formation ayant fait élire le plus de députés européens.

 Les candidats officiels à la présidence de la Commission européenne lors d’un débat le 15 mai. De gauche à droite : Jan Zahradil (ECR), Nico Cué (GUE/NGL), Ska Keller (ALE), Margrethe Vestager (ADLE), Frans Timmermans (S & D) et Manfred Weber (PPE)
Les candidats officiels à la présidence de la Commission européenne lors d’un débat le 15 mai. De gauche à droite : Jan Zahradil (ECR), Nico Cué (GUE/NGL), Ska Keller (ALE), Margrethe Vestager (ADLE), Frans Timmermans (S & D) et Manfred Weber (PPE) AFP/Aris Oikonomou

    Qui remplacera l'atypique Jean-Claude Juncker, devenu médiatiquement connu pour ses mimiques et ses attitudes parfois décalées dans les grands sommets européens? Lors de la précédente élection en 2014, c'est le principe du « spitzenkandidat » qui avait placé le Luxembourgeois à la présidence de la Commission européenne. C'est-à-dire le fait de privilégier le chef de la formation arrivée en tête lors des élections européennes. Pour rappel, le président de la Commission européenne est élu par le Parlement européen, sur proposition du Conseil européen qui doit « tenir compte du résultats aux élections au Parlement européen ».

    Sauf que cette année les chefs des principaux Etats ne se sont pas montrés emballés par l'un des chefs de file, et encore moins par celui du parti favori de l'élection. A cela s'ajoute le jeu des alliances au Parlement européen qui n'est pas encore fait. Tout est donc encore possible, notamment pour un Français. Tour d'horizon des candidats.

    Manfred Weber (PPE), favori sur le papier

    AFP/Dimitar Dilkoff
    AFP/Dimitar Dilkoff AFP/Aris Oikonomou

    La logique du système éprouvé en 2014 lui est favorable. En effet, en tant que tête de liste du favori Parti populaire européen (PPE), majoritaire dans la dernière mandature et soutenu en France par Les Républicains, Manfred Weber est sur le papier tout désigné pour prendre la tête de la future Commission européenne. Le député européen allemand, issu du centre-droit et disciple d'Angela Merkel, devrait être le candidat favori de la chancelière, ainsi que des gouvernements de droite de l'Union. Mais dans les faits, ce n'est pas si évident. La dirigeante allemande elle-même doute de son profil pour un tel poste. Elle partagerait même avec Emmanuel Macron l'idée de mettre un poids-lourd, un peu plus connu au-delà de ses frontières nationales. Ce qui est loin d'être le cas de l'élu de Bavière, parfait connaisseur des institutions européennes mais qui n'a jamais eu de poste d'importance.

    Michel Barnier (PPE), candidat officieux

    LP/Philippe de Poulpiquet
    LP/Philippe de Poulpiquet AFP/Aris Oikonomou

    Le Français, issu de la droite, n'est ni tête de liste désignée de son parti ni même prétendant officiel au poste. Mais son nom résonne de plus en plus fort dans les couloirs de la Commission. L'ancien ministre sous Balladur et Juppé, ex-député puis sénateur de Savoie, a en effet de sérieux atouts pour lui, qui le rendent plus « présidentiable » que le candidat officiel du PEE, Manfred Weber. D'abord, il a lui aussi une légitimité au sein du parti puisqu'il en est vice-président depuis treize ans. Mais surtout, c'est lui qui a été désigné négociateur en chef de la préparation et de la conduite des négociations avec le Royaume-Uni dans le cadre du Brexit. Michel Barnier s'est donc déjà frotté aux susceptibilités des pays membres et s'est fait un nom auprès des dirigeants des instances communautaires. Il pourrait donc être poussé dans l'arène par Emmanuel Macron, voire par Angela Merkel. Dans ce cas, il pourrait aussi être le candidat d'une éventuelle nouvelle alliance européenne, menée par les nouveaux députés LREM-MoDem.

    Margrethe Vestager (ADLE), dépendante de LREM ?

    LP/Philippe Lavieille
    LP/Philippe Lavieille AFP/Aris Oikonomou

    La Danoise est commissaire européenne en charge de la concurrence depuis 2014. Elle est déjà connue dans son pays en tant qu'ex-ministre de l'Économie et des Affaires intérieures, ainsi que ministre de l'Education. Si elle a représenté l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe (ADLE) lors du débat organisé le 15 mai dernier, elle est en fait seulement l'une des têtes de listes désignées par le parti, qui a en effet choisi de faire incarner le mouvement par sept personnes. Mais au-delà de ce manque de lead appuyé, c'est surtout la dynamique des alliances qui risque de lui porter préjudice. En effet, si sur le papier les nouveaux députés issus de LREM-MoDem (liste Renaissance) devraient venir gonfler l'ADLE, rien n'est moins sûr. Les Français pourraient en effet vouloir lancer leur propre « alliance des progressistes », avec notamment dans le viseur des élus de centre gauche d'autres pays.

    Frans Timmermans (S & D), victime des divisions à gauche

    AFP/John MacDougall
    AFP/John MacDougall AFP/Aris Oikonomou

    Le Néerlandais est l'actuel vice-président de la Commission, après avoir été secrétaire d'Etat aux Affaires européennes aux Pays-Bas, puis ministre des Affaires étrangères. Polyglotte, il a donc l'habitude des relations internationales et parle notamment très bien le français. Si son statut ne fait aucun doute, son mouvement des Socialistes et démocrates (S & D), deuxième groupe parlementaire à Strasbourg, doit cette fois particulièrement composer avec les divisions des partis de gauche un peu partout, et notamment en France. Dans l'Hexagone, les quelques futurs élus de la liste Place-Publique-PS devraient siéger dans cette formation mais certains socialistes ont déjà fait connaître leur souhait de se rapprocher plutôt des écologistes. Globalement, les socialistes européens ne devraient pas faire les scores des précédentes élections.

    Ska Keller (ALE), l'écolo soutenue par des socialistes ?

    AFP/Stephane De Sakutin
    AFP/Stephane De Sakutin AFP/Aris Oikonomou

    L'élue allemande est co-présidente des Verts au Parlement et tête de liste de l'Alliance libre européenne (ALE). Elle a moins d'expérience que d'autres candidats mais incarne le dynamisme des écologistes dans les enjeux européens. En France, elle peut compter sur le soutien d'EELV et de certains élus de gauche, déçus par l'alliance Place Publique-PS-Nouvelle Donne. Pour autant, les écolos devraient avoir du mal à dépasser la barre des 7 %. Leur candidat n'a donc pas de réelle chance de représenter le Parlement.

    Nico Cué (GUE/NGL), une extrême gauche pas assez puissante

    AFP/Aris Oikonomou
    AFP/Aris Oikonomou AFP/Aris Oikonomou

    La tête de liste de la gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL), ancien secrétaire général des métallos Wallonie-Bruxelles du syndicat belge FGBT, n'a a priori aucune chance d'accéder à la présidence. Soutenu en France par Jean-Luc Mélenchon, il ne devrait en effet pas assez bénéficier des divisions de la gauche, et notamment des socialistes, pour pouvoir faire un score qui lui permette de peser dans les négociations.

    Jan Zahradil (ECR), la droite eurosceptique qui ne convainc pas le RN

    AFP/Aris Oikonomou
    AFP/Aris Oikonomou AFP/Aris Oikonomou

    Le Tchèque a beau représenter la droite nationaliste avec l'Alliance européenne des conservateurs et réformistes (ECR), ce n'est pas lui qui incarne la dynamique souverainiste que l'on observe aujourd'hui en Europe. L'ingénieur-chercheur est en effet soutenu par le parti polonais au pouvoir Droit et justice - et en France par le parti de Nicolas Dupont-Aignan - mais pas par les autres partis grands partis d'extrême droite, à l'instar du Rassemblement national en France. La montée en puissance du parti de Marine Le Pen, allié à celui de l'Italien Matteo Salvini, devrait plutôt former son propre groupe pour finalement remplacer l'actuel Europe des Nations et des Libertés (ENL). Il n'est en revanche pas vraiment question pour eux de briguer la présidence de la Commission.

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